
Chorégraphie de Victor Duclos
Photographiées par Jasmine Bannister
Les valseuses
Evelyne Enault & Marie Weiss

Lorsque la ville de Granville m'a proposé ce projet : faire un défilé intergénérationnel dans la salle de spectacle de l'Archipel. Avoir quartier libre, avec pour seule contrainte, de ne pas choisir les mannequins. J'avoue avoir hésité une seconde.
J'ai rencontré une centaine de personnes pour cet évènement. Des mois à faire de grands gestes pour expliquer chaque tableau de ce spectacle que j'étais la seule à visualiser.
Maintenant, il fallait juste me faire confiance et s'accrocher.
Le défi était accepté.
Alors j'ai écouté, je me suis nourrie de chaque Histoire, chaque handicap, doute, complexe évident ou faiblesse avouée.
Chacune de leur faiblesse rendait ma détermination infaillible et l'envie de croire que tout allait être possible.
Lors de la première réunion de ce projet, j'entends cette phrase au détour d'un couloir, qui restera l'une des plus importantes.
- La maladie a emporté les premiers pas de la valse de leurs maris, elles ne peuvent plus danser.
Les rencontres s'enchainent. Je vois tous ces yeux effrayés, ces sourires timides, ces " je ne marche plus seule ma chère, ça me parait impossible" pendant que je répète mécaniquement l'explication du spectacle dont j'ai rêvé. Je ne m'entend même plus parler, j'observe les réactions, devant cette flamme que j'essaie de leur transmettre.
Un jour, je vois ces deux femmes, c'est l'évidence. Mes valseuses .Elles sont devant moi.
Elles rient fort, en équilibre entre la fragilité que l'on veut protéger à tout prix et la force de caractère admirable. Elles sont belles et athlétiques et je vois dans leurs yeux qu'elles n'auront plus besoin de cavaliers.
Elles acceptent. Tout.
Ce tableau c'est la vie d'Evelyne et Marie.
S'accrocher au vide, danser avec le souvenir .
Se faire mal, recommencer, tourner à perdre la tête, pour se relever dans la lumière.
Devant vous.
Défi relevé.
Cassandre.


